La radiothérapie asservie à la respiration

La radiothérapie asservie à la respiration

Les lésions situées dans le thorax ou l’abdomen sont mobiles du fait des mouvements respiratoire du patient. Au cours des cycles respiratoires la lésion subit à la fois des mouvements spatiaux mais aussi des déformations. Le volume de la lésion associé à ses mouvements défini un volume appelé ITV : Internal Target Volume, (ICRU 50, 62).

Durant plusieurs années, l’acquisition du volume ITV a été faite successivement en inspiration, en expiration et en respiration libre. Suivi d’une fusion, cette procédure a permis de visualiser les positions extrêmes du volume et de définir le volume à traiter. Toutefois, cette solution a tendance à surestimer le volume lésionnel.

L’objectif de tous les radiothérapeutes est à la fois de bien définir ce volume mais aussi d’essayer de le minimiser par rapport aux volumes environnants (ex: poumon) afin d’augmenter la dose de rayons X. Pour cela, les industriels avec l’aide des radiothérapeutes ont développé des techniques de synchronisation de l’acquisition des images et du traitement en fonction du mouvement de la tumeur. Les techniques de « gating » consistent à traiter le volume lésionnel dans une position choisie.

 

Suivi du rythme respiratoire à partir d'un marqueur posé sur l'abdomen

Suivi du rythme respiratoire par une camera RGSC (Varian) à l’aide d’un marqueur posé sur l’abdomen

La respiration bloquée en inspiration

Cette technique demande la participation du patient qui va bloquer sa respiration plusieurs secondes, en inspiration, à un niveau d’amplitude visible sur un écran. Cette technique est proposée dans beaucoup de centres et répond à l’objectif de protéger les tissus sains ou les organes à risques (poumons, cœur, moelle, …). En effet, en gonflant les poumons, il est possible d’écarter la lésion des organes à risques ou par exemple, de minimiser proportionnellement le volume d’une lésion dans le parenchyme pulmonaire.

Le service d’oncologie-radiothérapie utilise cette technique dans le traitement des tumeurs du sein gauche afin d’éloigner au maximum la glande mammaire du cœur et du parenchyme pulmonaire. Les patientes sont prises en charge par une infirmière d’éducation thérapeutique qui va les « coacher » de façon à ce qu’elles puissent maintenir un niveau de blocage respiratoire acceptable et compatible avec le traitement. Cette phase permet de déterminer si les patientes sont capables d’accepter cette contrainte. Mais, pour les patientes qui peuvent suivre les consignes et atteignent une bonne maitrise du blocage respiratoire, cette formation les aide à devenir « actrices » de leur traitement ce qui favorise une meilleure prise en charge.

Durant la préparation, les patientes déterminent un niveau d’inspiration bloqué acceptable. Durant le traitement, les patientes maintiennent et visualisent leur niveau de blocage sur un écran de contrôle du système Exactrac Dynamic (Brainlab). L’accélérateur est asservie au niveau d’inspiration déterminé avant le traitement. Dès que le niveau de blocage respiratoire est atteint, l’accélérateur délivre le traitement. Quand la patiente doit reprendre son souffle, le niveau de blocage chute et l’accélérateur arrête le faisceau.

 

Exemple d'un traitement en respiration bloquée. La camera thermique du système Exactrac Dynamic montre en couleur verte que le niveau de blocage respiratoire prévu est atteint. La boule au centre du cercle indique le niveau respiratoire à la patiente. La courbe montre le niveau de blocage respiratoire au cours du temps visible dans la salle et sur le poste de traitement.

Exemple d’un traitement en respiration bloquée en inspiration. La caméra thermique du système Exactrac Dynamic montre en couleur verte que le niveau de blocage respiratoire prévu est atteint. La boule au centre du cercle indique le niveau respiratoire à la patiente. La courbe montre le niveau de blocage respiratoire au cours du temps visible dans la salle et sur le poste de traitement.

 

 

La respiration libre

Le service traite également les patients en respiration libre. Le système comporte une caméra infrarouge associée à un ordinateur couplés au scanner (pour la préparation) ou à l’accélérateur (pour le traitement) qui visualise un objet réfléchissant posé sur l’abdomen du patient. Au niveau de l’acquisition, un mode dit rétrospectif permet d’acquérir les coupes sur chaque phase du cycle respiratoire (le nombre de phases est fixé à 10 entre deux inspirations) pour des tumeurs pulmonaires ou abdominales.

 

Radiothérapie asservie à la respiration : Courbe respiratoire d'un patientà la respiration

Courbe respiratoire d’un patient enregistrée avec une camera pendant l’acquisition du scanner 4D.

Les volumes à traiter (ITV) sont mieux définis en fonction de la mobilité de la lésion. Ce mode assure la visualisation du volume dans toutes les phases respiratoires. Le travail de synchronisation des coupes scanner et de la courbe respiratoire est réalisé sur le scanner Aquilion Exceed LB40 (Canon), qui décompose l’ensemble des mouvements de la lésion sur les trois plans.
Ce mode génère 10 phases correspondant à 10 positions de la lésion durant le cycle respiratoire. Le choix des phases les plus statiques (entre 30 et 70 % du cycle) détermine un volume (IGTV) plus petit que le volume défini par le mouvement sur tout le cycle. Cette approche limite l’irradiation des tissus sains. C’est la base de la radiothérapie asservie à la respiration (RAR).

A partir des 10 phases reconstruites, le scanner produit des images composites :

a) Des images MIP (Maximum Intensity Projection) résultent de la superposition du volume durant tout un cycle. Elles définissent le volume ITV (Internal Target Volume).

b) Des images AIP (Average Intensity Projection) génèrent une image de la position moyenne de la lésion sur tout un cycle. Elles montrent des images de la position la plus stable de la lésion et des OARs au cours du cycle.

Cette technique est aussi utilisée pour reconstruire l’ITV dans le traitement des petites lésions pulmonaires (Taille = 1cm) repérées en stéréotaxie extra crâniennes.

Les mouvements des volumes sont plus élevés pour des localisations situées dans les lobes pulmonaires inférieur. Ce sont plutôt ces localisations qui bénéficient des traitement en « gating » prioritairement. Pour des patients ayant des rythmes respiratoires très irréguliers et des fortes amplitudes nous utilisons le compresseur diaphragmatique pour limiter l’amplitude des mouvements respiratoires ou un traitement classique sur l’ITV.

Enfin, l’asservissement de la radiothérapie à la respiration, en respiration libre, nécessite plusieurs conditions : Des cycles réguliers, avec un niveau d’amplitude respiratoire assez stable, reproductibles et suffisamment longs pour que la durée du traitement soit acceptable. Les manipulateurs font du coaching respiratoire afin d’aider les patients à obtenir un rythme respiratoire régulier, en période et en amplitude.

 


Exemple d’acquisition scanner 4D (GE) montrant le mouvement d’une lésion sur un plan coronal dans le lobe pulmonaire supérieur droit

Il est aussi possible d’acquérir les volumes en mode prospectif. Dans ce cas, l’ordinateur de la caméra déclenche la production des RX pour un niveau d’amplitude respiratoire choisi. Ce mode peut être intéressant pour le traitement de la glande mammaire.