Le contrôle de qualité en radiothérapie

Le contrôle de qualité en radiothérapie

Programme d’assurance de qualité des traitements

En radiothérapie, les résultats thérapeutiques sont liés au respect du protocole, à la qualification du personnel, à la qualité des matériels et au contrôle de qualité de la réalisation du traitement.

Chaque étape conduisant de la prescription à la mise en œuvre optimale du traitement doit être analysée afin de minimiser les sources d’erreurs d’origine humaine ou technique et ainsi garantir la cohérence de la prescription médicale et la rigueur de son exécution. Depuis l’ouverture du service de radiothérapie, l’équipe de physique procède à ces analyses via le contrôle de qualité périodique des dispositifs présents sur le plateau technique et l’application d’actions correctives suite à l’analyse des incidents lors des CREX .

Dans la continuité de cette démarche, le service de radiothérapie a élaboré un programme d’assurance de qualité répondant aux exigences de l’autorité de sûreté nucléaire (ASN) afin de renforcer les actions déjà entreprises pour améliorer la qualité et la sécurité des traitements. Ce programme qui engage la responsabilité de la direction du groupe hospitalier repose sur :

  • une gestion documentaire exhaustive,
  • une étude des risques encourus par les patients,
  • une analyse des situations indésirables ou des dysfonctionnements potentiels tant sur le plan organisationnel, humain que matériel,
  • un contrôle régulier de tous les matériels participant à la chaîne de traitement.

Les contrôles réglementaires

Les contrôles de qualité internes

L’équipe de physique du service réalise des contrôles de qualité des accélérateurs linéaires, du scanner de préparation, des systèmes de calcul de la dose et du logiciel de transfert des données suivant les décisions du 23 juillet 2007 et du 7 novembre 2007 de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé). Les contrôles sont effectués selon des fréquences et des tolérances établies par l’ANSM. Ils portent particulièrement sur la précision mécanique des éléments de collimation du faisceau, la constance de la qualité des faisceaux de RX et d’électrons et sur les éléments d’imagerie que sont les imageurs portals et les systèmes d’imagerie embarqués. La précision des algorithmes de calcul et la constance de transfert des paramètres du traitement sur l’accélérateur sont également vérifiés.

Par exemple, les débits de tous les faisceaux de RX et d’électrons des accélérateurs sont quotidiennement contrôlés.

Contrôle des propriétés dosimétriques d'un faisceau de traitement de l'accélérateur Clinac

Contrôle des propriétés dosimétriques d’un faisceau de traitement de l’accélérateur Clinac

 

Les contrôles de qualité externes

Tous les 3 ans, les faisceaux de RX et 3 faisceaux électrons les plus utilisés de chaque accélérateur sont vérifiés par une société extérieure (EQUAL-ESTRO). Les mesures sont réalisées dans un fantôme d’eau pour différentes géométries de faisceaux, avec ou sans accessoires. Ces contrôles permettent de vérifier que dans chaque situation proposée la dose calculée et prescrite est conforme à la dose mesurée.

Tous les ans, un contrôle complet des paramètres physiques et dosimétriques du scanner de préparation est effectué par une société indépendante.

Les inspections de l’autorité de sûreté nucléaire

Les inspecteurs de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) visitent le service tous les ans. Les inspecteurs vérifient la mise en oeuvre des contrôles de radioprotection des personnels et le programme d’assurance de qualité conçu pour la prise en charge des patients. Ils vérifient que les contrôles externes et internes sont bien réalisés en exhaustivité et en fréquence. A l’issu de ces contrôles une lettre de suivi d’inspection est adressée à la direction de l’AP-HP, à celle de l’hôpital, et au chef de service de radiothérapie. Elle énumère les points de fonctionnement à améliorer et les actions correctrices à engager.

Les contrôles de qualité des traitements

Contrôle de qualité des systèmes de calcul de la dose

Lors de l’installation d’un nouvel appareil de traitement, le radiophysicien réalise différentes mesures de doses qui permettent de modéliser sur informatique les traitements selon différentes modalités. Il est de sa responsabilité de s’assurer de la justesse des calculs réalisés. Pour cela, les doses restituées sont comparées aux doses mesurées.

Des tests réalisés dans plusieurs configurations simples permettent de valider la majorité des traitements de radiothérapie. La prise en compte de l’hétérogénéité du corps humain en termes de densité électronique est bien sûr étudiée en utilisant des fantômes anthropomorphiques, simulant le corps humain.

 

Coupe scanner du fantôme anthropomorphique utilisé pour la validation des logiciels avec prise en compte des hétérogénéités

Coupe scanner du fantôme anthropomorphique (CIRS) utilisé pour la validation des logiciels avec prise en compte des hétérogénéités

Des simulations de traitements sont réalisées en contrôlant que tous les paramètres mis en place lors de la planification du traitement sont transmis correctement au poste de traitement. Le calcul du nombre d’unités moniteurs (temps de traitement) qui détermine la dose délivrée par séance est effectué sur deux systèmes différents et vérifié par deux intervenants (un membre de l’équipe de physique et un des manipulateurs de l’appareil de traitement).

Dans les configurations plus complexes (traitement par modulation d’intensité par exemple), les calculs sont vérifiés sur fantômes pour chaque patient.

Distribution dosimétrique d'un faisceau modulé en intensité mesurée sur un film dosimétrique placé dans un fantôme équivalent tissu.

Distribution dosimétrique d’un faisceau modulé en intensité mesurée sur un film dosimétrique placé dans un fantôme équivalent tissu.

 

Calcul et mesure d'un profil modulé en fluence (IMRT)

Calcul et mesure d’un profil modulé en fluence (IMRT)

 

Des vérifications particulières sont également mises en œuvre pour les techniques de traitement telles que l’arcthérapie, utilisées en stéréoradiothérapie.

 

Comparaison des distributions de doses calculées et mesurées pour un traitement de type arcthérapie

Comparaison des distributions de doses calculées et mesurées pour un traitement de type arcthérapie

 

Contrôle de qualité de la réalisation des traitements

La prise en charge des patients pour des traitements de radiothérapie demande la mise en place d’actions de contrôle afin de s’assurer que la sécurité radiologique du patient est effective.

Divers systèmes d’imagerie (scanner, IRM, TEP-TDM), de calculs simulant la distribution de dose dans les tissus, sont mis en œuvre pour délivrer précisément les doses de rayonnement sur la lésion avec les accélérateurs linéaires d’électrons.

Les traitements de radiothérapie respectent les étapes suivantes :

  • Une étape de préparation comportant l’acquisition des images scanner pouvant être associées à d’autres imagerie, la segmentation des volumes (les cibles) et les organes à risques (OAR), le calcul de la distribution de dose, et enfin l’export des calculs vers un système de contrôle des paramètres permettant de gérer l’accélérateur.

  • Une étape intermédiaire de contrôle de qualité, qui porte sur le double calcul des temps de traitements sur un système indépendant et la projection des faisceaux dans un fantôme dédié afin de vérifier que la distribution mesurée sur l’accélérateur est conforme à la distribution calculée sur l’ordinateur de simulation (pré-traitement).

  • L’étape de traitement avec l’accélérateur linéaire d’électrons, qui met en œuvre des systèmes d’aide au positionnement précis des patients (imagerie embarquée cone beam CT, systèmes d’imagerie surfacique et systèmes de positionnement du faisceau (imagerie portale MV).

En 2007, l’Institut National du Cancer (INCa) a défini des critères d’agrément pour la radiothérapie externe dont 2, portent sur le double calcul sur un système indépendant (Critère 12) et sur la dosimétrie in-vivo à réaliser en cours de traitement (Critère 15).

Jusqu’à ces dernières années, ces contrôles ont été effectués par des systèmes différents (fantômes numériques, diodes au Si), nécessitant à la fois des ressources humaines, du temps de mesure et d’étalonnage et la disponibilité des accélérateurs linéaires.

En 2020, le service de radiothérapie de l’hôpital TENON a acquis le logiciel « Perfraction » de la société SUN Nuclear. Ce système propose sur la même plateforme logicielle, un système de planification de traitement, et la possibilité de faire, grâce à l’imagerie portale, des mesures prétraitements et des mesures de dose in-vivo à distance sans interagir avec le patient pendant le traitement. Outre les images des faisceaux qu’il acquiert, l’imageur portal permet d’acquérir une dose à distance du patient calculée en fonction du nombre de trames acquises (images élémentaires) et des valeurs des niveaux de gris dans l’image.

Ce système a été préalablement étalonné en dose avec les imageurs portal des 3 accélérateurs du service afin de fournir des mesures précises.  Ensuite, pour chaque localisation traitée et technique utilisée, des valeurs de tolérance sur les doses ont été établies de manière à ce que le système génère des alertes auprès des physiciens si des écarts de doses calculées ou des différences entre les calculs et les mesures se produisent en cours de traitement.

En pratique, les planifications de traitement (images, contours et calculs de dose) sont adressées à « Perfraction » qui fait le double calcul avec son algorithme propre. Les images produites sur les accélérateurs sont adressées automatiquement vers le serveur qui réalise les calculs dosimétriques matriciels en tâche de fond relativement aux données reçues lors des planifications. Le calcul consiste à comparer les matrices de dose mesurées et calculées, dans un plan du faisceau en profondeur dans les tissus du patient, suivant la méthode du Gamma index. Cette méthode prend en compte à la fois la différence de dose relative (calcul/ mesure) et la distance au point de mesure. En général, les écarts sont acceptables à moins de 3 % d’écart en dose et de 3 mm en distance.

 

Comparaison entre les matrices de doses mesurées (G) et calculées (D) et la différence en Gamma index au centre pour un contrôle de sein (Figures du haut) . La comparaison des profils de dose selon les axes X et Y est présentée. (Figures inférieures).

 

Ce système mis en œuvre en 2021, permet d’augmenter le nombre de contrôles de qualité des plans de traitement et des traitements pour tous les patients grâce notamment à son intégration dans le système d’information du plateau technique. Toutes les après-midi un physicien vérifie sur « Perfraction » les calculs et les mesures de contrôle (in vivo) aidé par le système qui détecte par un témoin vert ou rouge si les tolérances fixées par localisations et techniques sont respectées.

En 2021, tous les patients ont eu un double-calcul (1158), 361 mesures de contrôle des faisceaux pré-traitement et plus de 1000 dosimétries in-vivo ont été effectuées et enregistrées dans la base de données « Perfraction » permettant de s’assurer de la sécurité radiologique à chaque étape du traitement.